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LA MORT DE PAN.


vicaire qu’on lui avait adjoint (l’abbé du déjeuner, sans doute) , tyrannique et sec, menait tout. Fanatique pour Rome, exclusivement dévot à la Vierge, dès les premiers jours on devina qu’il aurait San-Pansi en horreur. Il voulait d’abord abolir ermitage et pèlerinage.

Mais les villageois résistèrent. Lui, cependant, bouleversait tout, gâchant le plâtre et recrépissant. Il remplaça par un tableau fabriqué tout frais à Paris, représentant je ne sais quoi et puant encore la peinture, la toile immémoriale où se voyait le grand San-Pansi avec la houlette, parmi les arbres, au milieu des chèvres, sous un ciel bleu parsemé d’étoiles d’or. Il rasa l’ermite, il lui imposa chapeau net et soutane propre. Puis un matin, parlant en chaire, il annonça aux fidèles stupéfaits, mais vaincus par ce coup d’audace, que San-Pansi désormais ne s’appellerait plus San-Pansi, que ce Pansi était un faux saint, qu’on ne lui devait aucun culte, et qu’à la demande expresse de Monseigneur, N. S. P. le pape venait, honneur insigne ! de placer la chapelle purifiée et restaurée sous l’invocation de Saint Pie.

— Saint Pie ! Saint Pie !… qui connaît ça ? conclut le vieux satyre en haussant les épaules.

— Mais les fromages ? les pots de miel ?…

— interdit, comme tout le reste !

Et me montrant l’autel de grès :

— Vienne la fête, et s’il y pense, l’enragé m’enverra ma pierre rouler là-bas dans le vallon.