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LE CLOS DES AMES


caractérisait-elle pas dignement un mobilier bourgeois amassé pièce à pièce, conservé toujours et toujours accru par dix générations de Subes ?

Certaines tentures trop étroites ne recouvraient pas exactement leur pan de mur ; plus courts et plus longs que les tringles, quelques rideaux n’étaient pas de mesure. M. Sube s’expliqua ceci en réfléchissant que tringles et rideaux pouvaient provenir d’héritages.

Au dos armorié des fauteuils, sur les cachets de l’argenterie, M. Sube découvrait des chiffres et des blasons de mille sortes. M. Sube en conclut — non sans vanité — à d’innombrables alliances nobles, dont le souvenir se serait perdu.

Et découvrant à ses portraits d’ancêtres certains airs de hauteur aimable chez les hommes et de grâces hautaines chez les femmes qu’il n’avait jamais vus dans son miroir lorsqu’il se rasait, ni sous la coiffe à canons de la tante Ursule, M. Sube s’avoua que, dans l’air empeslé de l’incrédulité moderne, les vieilles races dégénéraient, et il prit texte de la chose pour maudire une fois de plus cette abominable Révolution.

Un fait pourtant troubla M. Sube : ce fut de voir la bibliothèque personnelle de son père, du vénéré Sube-le-Rouge, bourrée jusqu’aux solives des plus infâmes productions du siècle dernier. Car il y avait là l’Encyclopédie, le Dictionnaire philosophique,