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LA GUEUSE PARFUMÉE.


croit riche toujours, à même de choisir, et me sait bon, incapable de la violenter… Peut-être en aime-t-elle un autre ! Un autre ! mais qui, alors ? On n’allait que rarement à la ville, la jeunesse dorée de Canteperdrix ne venait jamais au château…

Puis, se rappelant tout d’un coup Estève, ses visites fréquentes avant le projet de mariage, et subitement interrompues depuis :

— Double brute ! s’écria-t-il.

À ce cri, un lapin attardé, queue blanche en l’air, fila d’un buisson. Emporté par son instinct de chasseur, M. Blasy visa, tira, tua ; et tandis que le chien s’ensanglantait les babines à rapporter la bête morte, M. Blasy se rasseyant, continuait :

— Oui ! double brute, c’est le mot. Double brute, et même triple brute, de n’avoir pas deviné déjà qu’il s’agissait d’Estève !

Au coup de fusil, le père Antiq, qui guettait M. Blasy, apparut.

— Bonsoir, père Antiq, je ne suis pas fâché de vous voir.

— Ni moi non plus, monsieur Blasy. Bien le bonsoir, monsieur Blasy !

— Voici bien longtemps qu’on n’a rencontré votre neveu, père Antiq ?

— Amoureux comme il est, monsieur Blasy, mettez-vous à sa place.

— Amoureux ?