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LE TOR D’ENTRAYS.

Pour conclusion : mariage ou vente ! Le père Antiq avait deviné juste ; l’abbé, en cette affaire, jouait double jeu.

La mise en parcelles d’un domaine comme Entrays constituait, dans tous les cas, une spéculation fort productive ; et, quoique peu révolutionnaire de sa nature, l’abbé Mistre, homme de fait avant tout, n’avait jamais hésité à compléter l’œuvre de la révolution en détaillant très-cher aux paysans les biens nationaux détenus par la bourgeoisie.

D’autre part, sa position à Canteperdrix était, en somme, équivoque. Curé sans paroisse, au plus mal avec son évêque, et n’ayant gardé du prêtre que la soutane, il vivait seul à la campagne avec son petit-neveu et sa nièce, madame Ambroise, une forte brune, jadis belle. J’oubliais monsieur Ambroise, mari de la nièce, et père putatif du jeune Anténor. Mais c’était une sorte de paysan vêtu en bourgeois, ivrogne et résigné qui buvait et ne se montrait guère.

Toutes ces choses faisaient sourire ; et les dames de la ville qui allaient volontiers, une fois par hasard, comme en passant, boire le lait chez les Mistre, ne les eussent pas, certes, reçus. L’abbé, soit ! par respect pour sa soutane, mais point la nièce.

En s’alliant avec la famille Blasy, si respectée, l’abbé Mistre frappait un coup décisif. Il entrait, lui et les siens, dans la haute société (les villages ont leur haute société), par la grande porte. Soutenu dé-