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LA GUEUSE PARFUMÉE.


foncier sous les fourches caudines du métayage, telle eût été la solution logique, pratique. M. Blasy n’avait pas voulu écouter. Maintenant il était trop tard.

Ce bon monsieur Blasy croyait sincèrement s’être rendu fort utile à son pays, pour quelques conseils d’agronomie transcendante jetés aux paysans railleurs, par-dessus la haie, en passant. Il regardait comme un point d’honneur, un devoir même, de tenir jusqu’au bout son rôle de gentilhomme agriculteur et chasseur. Quoi ! ne plus courir le pays la carnassière au dos et le Lefaucheux sur l’épaule ! ne plus faire feu de ses souliers ferrés dans les cailloux roulants des pentes ? ne plus présider de comices ! ne plus acclimater des poules étranges, ne plus exposer des coqs hérissés et bizarres ! ne plus décacheter, au cercle, d’un doigt brusque et d’un geste imposant, le Journal des chasseurs ou bien la Revue agricole de la zone de l’olivier !

C’est à ce jeu que le bon M. Blasy, sans trop s’en douter, avait vu s’écouler sa fortune. Quelques besoins d’argent immédiatement satisfaits, grâce à l’obligeante intervention de l’abbé Mistre ; de petits emprunts, puis de gros, les terres peu à peu hypothéquées, tout cela mené sans bruit, avec une discrétion ecclésiastique et notariale ; et maintenant c’était la vente, Entrays dépecé bribe à bribe par la fourmilière des paysans.

Il le fallait ! L’abbé Mislre n’était point riche. Ne