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LE TOR D’ENTRAYS.

Elle fait est qu’il serait difficile d’expliquer par une autre hypothèse la formation de ces trois plateaux échelonnés, leurs surfaces mathématiquement horizontales et parallèles, la coupe strictement perpendiculaire de leurs flancs taillés droit comme d’immenses murs, et la quantité de galets roulés, pareils à ceux de la Durance, que l’on y rencontre partout.

De temps immémorial, la vallée et le plus bas Tor appartenaient aux paysans de Canteperdrix : champ étroit pour leurs bras, et qui, à les nourrir, suffisait à peine. Aussi regardaient-ils d’un œil d’envie le Tor-le-plus-haut et le Plan.

Avant 89, Entrays, plan et tor, était fief, avec droit de colombier et de garenne, ainsi que le témoignent encore quelques trous à lapins entre quelques maigres touffes de lavande, et une construction ayant apparence de tour, plantée en avant du château, sur la pointe extrême du promontoire, tour que l’on prendrait pour un donjon féodal, vu son site escarpé et sa mine bourrue, sans la triple ceinture de briques jaunes vivement vernissées, qui l’enserrent à mi-hauteur et furent placées là évidemment pour garantir les pigeons seigneuriaux des escalades de la fouine.

Vendu comme bien national en 94, et acheté par un riche bourgeois, le Tor d’Entrays n’avait pas changé de destin en changeant de propriétaire. Le domaine, trop vaste, restait peu ou point cultivé. Il aurait fallu des mille et des mille écus pour le mettre en état.