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XXXI

le verre d’eau

Vous avez lu Mireille et ce merveilleux dialogue d’amour qui fera le mûrier du mas des Micocoules éternellement sacré, comme le balcon du palais Montaigu, aux poëtes et aux amoureux :

— « Peut-être un coup de soleil, dit Vincent, vous a enivrée. Je sais moi une vieille au village de Baux, la vieille Taven, elle vous applique bien sur le front un verre plein d’eau, et promptement du cerveau ivre, les rayons exorcisés jaillissent dans le cristal. »

Depuis longtemps, on se le rappelle, le soleil m’avait enivré, un rayon fou me dansait dans la tête ; la réponse de mon père fut le verre d’eau froide qui me guérit.

Mais au prix de quelle épouvantable crise !

Voilà donc mes pressentiments changés en certitude : Roset morte, et comment ensevelie ! Je courus d’une traite à la Cigalière ; et toute la nuit, pleurant Roset, au pied du figuier où les paysans me retrouvèrent à l’aurore, je sentis avec une bizarre