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LA GUEUSE PARFUMÉE.


rent, se succédèrent comme les cercles qui courent sur l’eau, et toutes finissaient par se confondre en une commune obsession, toutes me faisaient entrevoir des rapports étranges entre deux faits qui peut-être vous sembleront n’en avoir guère : la disparition de Roset et la terre remuée sous mon figuier.

Le soir, sur la place du Cimetière Vieux, à l’heure où les moineaux font tapage dans les ormes, quelques personnes allaient et venaient.

D’un air indifférent, je me mis au pas de la promenade, à la droite de M. Cabridens ; puis toujours à mon idée, je fis descendre la conversation, par cascades habilement ménagées, du prix courant des chardons et des garances dont la société s’entretenait, aux mœurs singulières des bohémiens. Cette manœuvre me fut d’autant plus aisée que l’inépuisable M. Cabridens avait autrefois, nous dit-il élaboré, un mémoire sur cet important problème ethnologique…

— Ethnologique et social ! interrompit le nouveau substitut, petit jeune homme de trente-six ans, frais comme cire, et si blond, si blond qu’on apercevait distinctement sa peau trop blanche à travers l’or clair de ses favoris. Social ! ai-je dit : est-ce, en effet, autre chose qu’un problème social, ces tribus qui vivent nomades en pleine France comme l’Arabe dans son désert, qui se rient des gouvernements, qui ne veulent ni lois ni prêtres, qui méprisent l’état civil, et qui, chose épouvantable à penser, naissent, se ma-