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JEAN-DES-FIGUES.


amies de pension, la fine fleur de l’aristocratie cantoperdicienne, lisaient la Vie Parisienne au fond des Alpes, chantaient Offenbach d’un accent délicieusement provençal, et promenaient, le dimanche au sortir des vêpres, sur les cailloux pointus de la place du Cimetière Vieux, d’invraisemblables robes à fanfreluches.

Quelques petits cousins revenus pales de leur cours de droit, monocle sur l’œil, pantalon collant, un stick garni d’or à la main pour monter des chevaux de ferme, donnaient la réplique à ces demoiselles.

C’était horrible ! mais le moyen de se dégager ? Mes façons parisiennes et la coupe distinguée de mes cols m’avaient conquis irréparablement la bonne madame Cabridens ; M. Cabridens, qui, sous sa bedaine de notaire cachait une âme de littérateur, était ébloui de ma jeune gloire ; quant à mademoiselle Reine, même sans le souvenir de nos amours, elle aurait, je crois, épousé le diable en personne si le diable avait dû la conduire à Paris.

Enfin le jour du mariage fut fixé ; les couturières coururent la ville, on s’inquiéta des invitations ; le pâtissier de la grand’rue rêva, en me voyant passer, pièces montées et gâteaux de fécule, et j’allais devenir, sans plus de résistance, le glorieux gendre e M. et madame Cabridens, quand un matin je vis entrer chez moi, devinez qui ? Nivoulas mon ennemi, Ni-