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LA GUEUSE PARFUMÉE.

les noces de Roset ! Alors me rappelant combien depuis six mois j’avais souffert, et de quelle façon ridicule ! encore meurtri, encore aigri, j’eus honte de mon lâche empressement.

— Fuyons la tentation, allons à Maygremine !

Je me mis donc en route pour Maygremine ; toutes mes illusions, tous mes souvenirs d’enfance m’étaient à la fois revenus. Le désir que j’avais de ne pas aimer Roset me faisait à ce moment presque croire que j’aimais Reine.

L’orage, un orage d’automne, menaçait quand je partis, et dès mes premiers pas hors la ville quelques gouttes lourdes et larges comme des sous, s’aplatirent en fumant dans la poussière de la route. Je ne voulus pas retourner pourtant, le ciel avait des coins bleus, j’espérais atteindre Maygremine avant le gros de la pluie. Mais en un clin d’œil les nuages crèvent déchirés par l’éclair, l’eau tombe à seaux, la route roule une rivière, et avant que j’aie pu me mettre à l’abri, je me trouve ruisselant de la tête aux pieds, le chapeau fondu, tout couvert de boue, dans un état à ne me présenter nulle part.

En aurai-je le démenti ? Je rentre chez moi, toujours poursuivi par l’idée de Roset ; je me refais beau en pensant à Reine, et je repars pour Maygremine, sur la foi d’une éclaircie.

Il faut croire que la pluie m’en voulait ce jour-là, car, surpris d’une nouvelle ondée, mon veston bleu