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LA GUEUSE PARFUMÉE.


revenait de province, plus amoureux que jamais, avec un héritage et pardonnait tout, à cette condition qu’on l’aimerait comme autrefois, et qu’on renoncerait aux Mingréliens, aux Valaques et à Jean-des-Figues.

— Faut-il que je renonce ? me demanda Roset.

— Mon Dieu, oui ! Pourquoi pas ? lui répondis-je la rage au cœur, mais sans rien en laisser voir.

— Adieu alors, Jean-des-Figues !

— Adieu, Roset.

C’est ainsi que nous nous quittâmes ; et le soir même, un grand désir de calme, de repos aux champs m’étant venu, le soir même je m’embarquais pour Canteperdrix, triste, il est vrai, mais heureux aussi de voir une fin à mes ridicules amours et à mon ridicule martyre.

Pourtant, au moment de partir, je crus me rappeler que le matin, en nous quittant, lorsqu’elle me disait : Adieu, Jean-des-Figues ! de sa voix malicieuse, Roset avait une larme, une toute petite larme tremblante au coin de l’œil.

— Est-ce que par hasard elle m’aimerait ? Et j’eus presque envie de ne plus partir. Mais je m’aperçut que moi-même je pleurais. Alors tout mon scepticisme me reprenant :

— Fou, fou, que tu es ! m’écriai-je, de croire que Roset a pu t’aimer. Roset, tu le sais bien, n’aime que les caroubes et la cigarette, et si ses beaux yeux allu-