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LA GUEUSE PARFUMÉE.

Ici, au contraire, la verdure et l’eau, les fleurs humides, les mousses mouillées où le pied s’enfonce, et partout, même aux endroits élevés du bois où n’apparaissent ni étang ni fontaine, un bruit d’eaux cachées qui vous environne, comme si de petites sources couraient de tous côtés sous vos pieds en nombre infini, et montant par d’invisibles canaux dans l’intérieur des hautes herbes et jusqu’à la cime des grands arbres, venaient se résoudre en vapeur sur la surface veloutée des feuilles et affluer plus abondantes aux lèvres toujours fraîches des fleurs.

— C’est plus beau, disait Roset dans son enthousiasme, oui, c’est encore plus beau que le travers des Sorgues à Maygremine !

La pluie elle-même ne nous arrêtait pas, et je me rappelle que nous fîmes notre dernière promenade par une de ces pluies mêlées de soleil dans un joli ciel gris couleur de perle, qui conviennent aux mignons paysages des environs de Paris autant qu’un soleil bleu à une olivette, et qui les embellissent même comme certaines beautés de femme à qui va bien le demi-deuil.

Quelle fraîcheur il faisait ! on eût dit que toutes les petites sources invisibles avaient fait irruption cette fois, entr’ouvrant les rudes écailles de l’écorce ou brisant la fine enveloppe des feuilles et des fleurs. Sous chaque arbre, sous chaque brin d’herbe sourdait un filet d’eau, et c’était, le long des étroits sen-