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JEAN-DES-FIGUES.

suite me permit de porter des gants sans apprentissage et de n’avoir pas l’air trop humble devant personne : les deux grands secrets du savoir-vivre, à ce que j’ai cru deviner depuis.

D’ailleurs, en cherchant bien, qui est sûr de n’être pas un peu noble, dans un pays surtout où la marchandise anoblissait ? Je suis noble, moi, tout comme un autre ; un de mes aïeux, parait-il, venu de Naples avec le roi René, apporta le premier l’arbre de grenade en Provence, et, sans remonter si loin, dans le pays on se souvient encore de Vincent-Petite-Epée, mon arrière-grand-père maternel. Que de fois n’ai-je pas entendu raconter son histoire ! Dernier rejeton d’une illustre famille ruinée, Vincent, après mille aventures de mer et de garnison, possédait pour toute fortune, quelques années avant 1789, deux ou trois journées de vigne qu’il cultivait lui-même. Il les maria bravement avec trois ou quatre journées de pré que lui apportait en dot la fille d’un voisin. C’est ainsi que naquit ma grand’mère. Mais quoique devenu paysan, Vincent n’en continua pas moins à porter l’épée. Les gens qui le voyaient suivre son âne au bois en tenue de gentilhomme lui criaient : — « Bien le bonjour, Vincent l’Espazette !… Hé ! Vincent, qu’allez-vous faire de ce grand sabre ? » Et le bon Vincent répondait, sans paraître fâché de leurs plaisanteries : — « C’est pour couper des fagots, mes amis, pour couper des fagots ! »