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LA GUEUSE PARFUMÉE.


corset ! et dis-moi s’il n’y aurait pas folie à vouloir trouver fidèle la demoiselle qui habitait dedans.

Nos bons aïeux n’y mettaient pas tant de malice. Crois-tu qu’ils riraient, Nivoulas, s’ils voyaient nos larmes, ceux qui venaient ici, il y a cent ans, faire sauter les belles filles ! Mais nous vivons, nous autres, dans un siècle de prud’homie, et malgré nos affectations de scepticisme, nous prenons tout au sérieux, tout, hélas ! et même Roset. Fils de Werther et arrière-neveux de Faublas, pétris à dose égale de corruption et de passion naïve, nous nous rendons amoureux du premier joli petit nez qui passe, surtout s’il est frotté de poudre de riz ! Du pur Faublas, tu vois… Puis, ce joli nez une fois trouvé, nous le voudrions vertueux, fidèle, des choses inouïes ! C’est Werther cela, un Werther farouche et ridicule qui souffre, qui déclame, qui appelle griffes les ongles roses des Parisiennes et s’imagine que le sang des cœurs rougit leurs lèvres quand elles sont simplement frottées d’un soupçon de carmin.

Donc, Nivoulas, si tu es Werther, cherche-toi une blonde en corset lacé qui sache tailler les tartines ; mais c’est trop comique à la fin ; oui, je te le dis, c’est trop comique de rêver le cœur de Lolotte sous le corset en satin rose de mademoiselle Roset.

Là-dessus je fondis en larmes. Nivoulas, qui ne s’était jamais vu consoler de la façon, commençait à me croire fou et témoignait quelque inquiétude. Il ne