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LA GUEUSE PARFUMÉE


commencé, je ne sais pas quel train ils mènent là-haut.

Nivoulas affectait un air indifférent, mais je n’eus pas de peine à voir combien, au fond, il était malheureux. Est-ce qu’après lui avoir pris sa revue, me disais-je en montant l’escalier, ces enragés-là lui auraient encore pris sa maîtresse ? Je ne me trompais pas de beaucoup.

Au beau milieu du salon, sur des coussins entassés, une jeune personne était assise. — La Grecque des îles ! murmurait-on. Son air ne me parut pas nouveau, pourtant je ne la reconnus pas d’abord, à cause du costume. Figurez-vous qu’elle portait une robe d’or fendue par devant à la mode orientale, et sous la robe une chemise de soie, claire comme de l’eau claire, qui laissait entrevoir, ma foi ! une fort jolie petite personne. Ces messieurs avaient trouvé madame plus amusante qu’une lecture, ils l’avaient grisée de champagne, et pour le quart d’heure on en était déjà à lui indiquer des poses plastiques, caprice d’artistes auquel l’aimable enfant, qui avait l’air de s’amuser beaucoup, se prêtait avec une rare complaisance.

Je compris alors la tristesse de Nivoulas.

Tout à coup, la Grecque des îles me regarde, pousse un cri et se précipite à bas de ses coussins, si vivement, ô pudeur ! que sa babouche s’embarrassant dans un pli de sa fine chemisette…