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Machinalement, grand-oncle Imbert se mit à le suivre, marchant dans son ombre, la seule ombre qui fût sur le quai, et, en lui-même il se disait : « Mon pauvre Imbert, que tu t’ennuies ! mais en voilà un, par exemple, qui n’a pas l’air de s’ennuyer. »

Tout à coup, l’homme aux deux esclaves sortit un mouchoir brodé de sa poche, se le passa sur le visage et s’écria :

— « Couquin de Diou, qunto calour ! »

Étonné d’entendre un Turc se plaindre de la chaleur en marseillais, grand-oncle Imbert lui tape sur l’épaule :

— « Quant voles juga que sies Prouvençàu ?  »

S’il était Provençal ? Jugez : un cousin, un Gazan de la branche aînée dont la famille avait perdu la trace et qui était là-bas quelque chose comme prince ou roi.

— « C’est même à cette occasion, concluait M. Honnorat, que grand-oncle Imbert prit le turban pour quelques années.

— Il prit le turban ? interrompt l’abbé.

— Oui ! il prit le turban, il se fit Turc. L’homme a besoin de religion et toutes les religions sont bonnes. D’ailleurs, son turban nous