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passé. Mon sentiment, d’ailleurs, peut se défendre : l’avenir nous étant fermé, revivre le passé reste encore le seul moyen qui s’offre à nous d’allonger intelligemment nos quelques années d’existence.

Tu sais aussi, pour m’avoir souvent plaisanté sur un vague atavisme barbaresque que ton érudition moqueuse me prêtait, tu sais quel faible j’eus toujours pour les souvenirs de la civilisation arabe.

Dans ce beau pays où, par la langue et par la race, au-dessus du vieux tuf ligure, tant de peuples, Phéniciens, Phocéens, Latins, ont laissé leur marque, les derniers venus, les Arabes seuls m’intéressent.

Plus que la Grecque qui, avec ses yeux gris-bleu s’encadrant de longs sourcils noirs, évoque la vision de quelque Cypris paysanne, plus que la Romaine dont souvent tu admiras les fières pâleurs patriciennes, me plaît, rencontrée au détour d’un sentier, la souple et fine Sarrasine, aux lèvres rouges, au teint d’ambre. Et tandis que d’autres sentent leur cœur battre à la trouvaille d’un fragment d’urne antique ou d’une main de déesse que le soleil a dorée,