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cines de l’ortie ou de la ronce, mais dont se contentent, en ce climat béni, trois pieds d’orangers, un laurier, une bordure de romarin, quelques fruits et quelques légumes.

Le tout, tant bien que mal, arrosé par l’eau rare d’une citerne que M. Honnorat ménage avec parcimonie.

La nuit approchant, je m’étais accoudé au parapet de ma terrasse, sans motif, histoire de réjouir mes regards des changeantes splendeurs de l’horizon qui, là-bas, s’empourpre ; et peut-être aussi parce que, juste sous la place que j’ai choisie, se trouve un banc de pierre, qu’un laurier ombrage, où, quelquefois, Mlle Norette aime s’asseoir.

Comme l’après-midi a été brûlante et que plantes et fleurs s’inclinaient altérées, Mlle Norette et Saladine font ruisseler largement, joyeusement, l’eau de la citerne, au grand désespoir de M. Honnorat, qui proteste.

Mlle Norette rit. Les voix montent dans l’air frais du soir.

— « Dès que l’on touche au robinet, s’écrie Saladine en montrant M. Honnorat, on dirait que son sang se verse. »