sans bien comprendre, fait effort pour s’intéresser à mes recherches sarrasines. Mais c’est mon fusil, j’en suis certain, qui finira par faire de lui un orientaliste distingué.
Oui ! mon fusil. Lorsque je vais à travers champs, j’emporte toujours un fusil en manière de contenance. Chasseur dans l’âme et fin tireur, l’abbé souffrait de me voir promener, sans jamais m’en servir, ce fusil ridiculement inutile.
Un jour, loin du village, et sûr de n’être vu par personne, il me le prit des mains, histoire de rire, pour essayer.
Il essaya et tua un lièvre.
Le lendemain, il essayait encore, et décimait une compagnie de perdrix.
Deux fois je rapportai mon carnier plein, ce qui, tout en stupéfiant M. Honnorat, me donna de la considération dans le village.
Et depuis, c’est chose entendue : quand nous sortons, ma cueillette érudite faite, je m’étends à l’ombre d’un roc, sous un arbre, et livre le fusil avec les cartouches au bon abbé qui, la soutane retroussée, montrant ses souliers à clous, son pantalon de bure roussi dans