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FRIQUETTES ET FRIQUETS

grand-duc resté reconnaissant, qui quelquefois leur en envoie.

Lorsqu’il entendit comparer ainsi avec un sérieux évidemment paradoxal la modeste table de l’hôtel Bridaine aux somptuosités culinaires célèbres certes, dans tout Paris, de la courtisane respectable par ses millions, et du prince de la science, le bon poète Savinien ne put s’empêcher de sourire ; et tandis que, de ses élégantes mains d’oisif, Xavier Luc étalait, sur du pain coupé en tranches minces et judicieusement beurré, l’ambroisie russe comparable pour ses reflets et son grenu à une confiture de perles noires, devenu soudain curieux, il examina lentement le singulier endroit choisi par le caprice de son amphitryon.

Une salle tout en longueur, propre et cirée à paraître glaciale, où dînent, chacun isolément, de vieux messieurs, de vieilles dames et des prêtres parmi lesquels un missionnaire joyeux, barbu, le ruban rouge à sa soutane, et un capucin gigantesque qui, d’après une confidence du garçon, a le titre d’abbé mitré.

Un simple vitrage sépare la salle à manger de la rue ; et, sur la mousseline des rideaux