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FRIQUETTES ET FRIQUETS

demi-sommeil de ses pensées, vers Paris et vers l’Infidèle !

Cela fleurait délicieusement l’air des champs et l’herbe sauvage.

Vingt fois, il ouvrit la fenêtre, mais l’obsession persistait.

Et toute la nuit, Marius rêva de celle qu’il prétendait ne plus aimer, et de nymphes lavandières qui, pour embaumer son boudoir, lavaient d’idéales lessives dans des eaux vierges promenées à travers vallons et prairies, parmi les touffes mouvantes des joncs, les masses immobiles des iris, sous les cressons, sous les plantains, les hautes menthes odorantes, et s’imprégnant des philtres subtils qu’exhalent les plantes et les fleurs.

Marius s’éveilla, maussade :

« C’était bien la peine d’avoir fui Lucinde et d’être venu à trois bonnes lieues de Montmarte chercher l’oubli avec la paix du cœur pour que, la première nuit, dans la première chambre d’auberge où je couche, tout, jusqu’au parfum des draps, ne me parle que d’elle… Il y a là-dessous un sortilège !… Pourquoi ces rudes draps d’auberge m’ont-ils,