Page:Arène - Contes de Paris et de Provence, 1913.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
37
LES HARICOTS DE PITALUGUE

changées en autant de cosses appétissantes et cassantes, et qu’on vit que seuls les haricots de Pitalugue ne fleurissaient ni ne grainaient, alors les gens s’en émurent dans la ville.

Les malins, sans bien savoir pourquoi, mais soupçonnant quelque bon tour, commencèrent à gausser et à rire.

Les badauds, en pèlerinage, allèrent contempler le champ maudit.

M. Cougourdan fut inquiet.

Et la Zoun s’installa sous la courge, accablant la terre et le soleil de protestations indignées.

III


Un soir, Tante Dide, mère de la Zoun, belle-mère de Pitalugue par conséquent, se rendit sur les lieux malgré son grand âge, observa, réfléchit et déclara au retour qu’il y avait de la magie noire là-dessous, et que les haricots étaient ensorcelés. Pitalugue abonda dans son sens ; et toute la famille jusqu’au quinzième degré de parenté ayant été convoquée à la maisonnette du Portail-des-Chiens, il fut décidé que, vu la gravité des circonstances, le lendemain on ferait bouillir.

Tante Dide, qui justement se trouvait être veuve, s’en alla donc rôder chez le terraillier de la Grand’-Place, dans le dessin de voler une marmite neuve ; car, pour faire bouillir dans les règles, il faut avant tout une marmite qui n’ait jamais servi, volée par une veuve. Le terraillier connaissait l’usage ; et, sûr d’être dédommage à la première occasion, il