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CONTES DE PARIS ET DE PROVENCE

— Voyons : rien qu’une petite, Pitalugue.

— Et mes haricots ?

— Tes haricots attendront.

L’infortuné Pitalugue résista d’abord, puis se laissa tenter. Fra sortit les cartes. On joua une partie, on en joua deux, et les haricots attendirent.

Bref ! l’alouette montait des blés, et les premiers rayons coloraient en rose la muraille de pierre sèche sur laquelle les deux joueurs jouaient, assis à califourchon, lorsque Pitalugue, retournant ses poches, s’aperçut qu’il avait tout perdu.

— Cinq francs sur parole ! dit Fra.

— Cinq francs, ça va, répondit Pitalugue.

Les cartes tournèrent et Pitalugue perdit.

— Quitte ou double ?

— Quitte ou double !

Pitalugue perdit encore.

— Maintenant, le tout contre ta semence.

Pitalugue accepta. Il était fou, ses mains tremblaient.

— Non ! grommelait-il en donnant, je ne perdrai pas cette fois, les cartes ne seraient pas justes.

Il perdit pourtant ; et l’heureux Fra, chargeant le sac d’un tour de main, lui dit :

— La prochaine fois, Pitalugue, nous jouerons l’âne.

Que faire ? Rentrer, tout avouer à la Zoun ? Pitalugue n’osa pas, la mesure était comble. Acheter d’autre semence ? Le moyen, sans un rouge liard !

En emprunter à un ami ? Mais c’eût été rendre l’aventure publique. Assuré du moins de la discrétion du barbier Fra (les joueurs ne se vendent