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connaissons que sur le bien on le mal que nous en avons appris, mais comment pourrait-on dire d’un homme qu’on nous fait connaître, qu’il nous est inconnu ? Ce ne sont pas sans doute les traits de son visage qui nous le font connaître, mais la connaissance qu’on nous donne de ses habitudes et de sa vie ; autrement il faudrait dire qu’on ne peut se connaître soi-même, puisqu’on ne peut voir les traits de son visage. Cependant la plupart du temps nous nous trompons sur ceux que nous connaissons de cette manière, car souvent l’histoire, et plus souvent encore la renommée, nous induisent en erreur. Dans l’impossibilité où nous sommes de pénétrer dans la conscience des hommes, nous pouvons au moins, pour n’être pas dupes d’une opinion mensongère, avoir une connaissance véritable et certaine des choses elles-mêmes. Quand donc on ne se trompe pas sur les choses ; qu’on blâme ce qui est réellement vice, et qu’on approuve ce qui est véritablement vertu, si l’erreur ne porte que sur les personnes, c’est une faiblesse qui tient à l’humanité et qui est digne de pardon. Il peut, en effet, arriver qu’un homme vertueux ait de la haine pour un homme également bon dont il ignore la vertu, et alors ce n’est pas cet homme, mais l’idée qu’il s’en fait, qui est l’objet de sa haine ; ou plutôt il peut arriver qu’il aime cet homme sans le connaître, parce qu’il aime le bien qui se trouve en cet homme. De même, un homme injuste peut avoir de la haine pour un homme vertueux, et l’aimer lorsqu’il le suppose injuste, en aimant alors en lui non pas ce qu’il est véritablement, mais l’idée qu’il s’en forme. Or, la même chose peut arriver pour Dieu. Ainsi, qu’on ait demandé aux Juifs s’ils aimaient Dieu, ils auraient répondu qu’ils l’aimaient sans faire un mensonge, mais en étant simplement dupes de la fausse idée qu’ils s’en formaient ; car comment peut-on aimer le Père de la vérité lorsqu’on a de la haine