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de son désir ; il se laisse emporter à la douce espérance qui vient de lui être donnée, et comme il ne craint pins maintenant de trahir son Maître, il l’interroge avec sécurité au milieu du silence que gardent les autres apôtres. « Pierre lui dit : Pourquoi ne puis-je pas vous suivre à présent ? Je donnerai ma vie pour vous. » Que dites-vous, Pierre ? Je viens de vous déclarer que vous ne pouvez pas, et vous insistez, en disant : Je le puis. Vous apprendrez donc par votre expérience que votre amour n’est rien sans la présence d’un secours surnaturel qui le dépouille de sa faiblesse. « Jésus lui répondit : Vous donnerez votre vie pour moi ? » — Bède : Cette proposition peut s’entendre de deux manières : premièrement, d’une manière affirmative, en ce sens : Vous donnerez votre vie pour moi, mais actuellement la crainte de la mort du corps vous fera tomber dans la mort de l’âme ; secondement, dans un sens ironique — S. AUG. C’est-à-dire, vous ferez pour moi ce que je n’ai pas encore fait pour vous ? Vous pouvez me precéder, vous qui n’êtes pas capable de me suivre ? Pourquoi tant de présomption ? Apprenez donc ce que vous êtes : « En vérité, en vérité, je vous le dis, le coq ne chantera pas que vous ne m’ayez renié trois fois, » vous qui promettez de mourir pour moi ? vous renierez trois fois celui qui est votre vie. Pierre voyait bien l’étendue du désir de son âme, mais il ne voyait pas sa faiblesse, malade qu’il était, il vantait bien haut l’ardeur de sa volonté, mais le Médecin connaissait son infirmité. Peut-on admettre, avec, quelques-uns qui, par une condescendance coupable, veulent excuser Pierre, que cet apôtre n’a point précisément renié le Christ, parce qu’à la question que lui fit la servante, il répondit qu’il ne connaissait pas cet homme, comme les autres évangélistes le disent expressément ? Comme si renier Jésus en tant qu’homme ne soit pas le renier comme Christ, et le renier dans ce