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par ses mauvais traitemens, je lui lançai une ruade de toute ma force, et voici ce qu’il imagina pour s’en venger. Il me chargea d’étoupes, qu’il attacha comme il faut avec des cordes ; ensuite il me met en chemin, et prenant un charbon ardent au premier hameau par où nous passâmes, il le fourre au milieu de ma charge. Le feu s’étant conservé et nourri quelque temps dans ces étoupes, la flamme commença à paroître, et bientôt je fus tout en feu, sans que je pusse imaginer aucun moyen de m’en garantir, ni d’éviter la mort, un embrâsement de cette nature, ayant plutôt fait son effet, qu’on n’a seulement eu le temps de songer à y remédier. Mais dans cette cruelle extrémité, la fortune vint à mon secours, et me garantit du trépas qui m’avoit été préparé, pour me réserver peut-être à de nouvelles peines. Ayant apperçu proche de moi une mare bourbeuse, que la pluie du jour précédent avoit remplie, je me jettai dedans tout d’un coup, et la flamme qui m’alloit brûler étant éteinte, j’en sortis soulagé de mon fardeau, et délivré de la mort ; mais ce méchant petit coquin, avec une effronterie sans pareille, rejeta sur moi la faute de l’insigne méchanceté qu’il venoit de me faire, et assura à tous les pâtres de la maison, que passant proche d’un feu que faisoient les voisins, je m’étois laissé tomber dedans exprès pour brûler ce que je portois, et me regardant avec un ris moqueur : Jusqu’à