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exciter encore plus, qu’il n’avoit fait, à boire beaucoup de vin pur, qu’on avoit tant soit peu fait tiédir. A la vérité, je le soupçonnai d’avoir mis quelque drogue assoupissante dans le vin ; car enfin, ils restèrent, tous tant qu’ils étoient, sans connoissance, et comme des gens morts étendus de côté et d’autre.

Alors Tlépolême les lie tous avec de bonnes cordes comme il veut, et sans nul obstacle, met la fille sur mon dos, et s’achemine pour retourner chez lui. D’abord que nous entrâmes dans la ville, tout le peuple qui avoit tant souhaité leur retour, accourt autour de nous, ravis de les revoir. Parens, amis, vassaux, domestiques, esclaves, tous s’empressent aussi de venir au-devant d’eux, la joie peinte sur le visage. C’étoit un spectacle bien nouveau et bien extraordinaire, de voir cette quantité de monde de tous âges et de tous sexes, qui accompagnoit une fille qu’on menoit en triomphe sur un âne. Moi-même enfin qui avois lieu d’être plus content, pour marquer, autant qu’il dépendoit de moi, la part que je prenois à la joie publique, ouvrant les nazeaux et dressant les oreilles, je me mis à braire de toute ma force, et fis entendre une voix de tonnerre.

Carite étant remise entre les mains de ses parens, pendant qu’ils prenoient soin d’elle dans sa chambre, Tlépolême, sans tarder davantage, me fit retourner