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parole me fût rendu, et je ne savois par où commencer ni par quelles expressions assez dignes je pourrais marquer ma reconnoissance à la puissante Divinité qui m’avoit été si favorable.

Cependant le prêtre qui avoit été instruit par la Déesse de tous les maux que j’avois soufferts depuis ma disgrace, demeura aussi fort surpris lui-même d’une si grande merveille. Il ne laissa pas néanmoins de faire signe qu’on me donnât une robe de lin pour me couvrir ; car, d’abord que j’eus quitté cette honteuse forme d’âne, je me trouvai tout nud, et je n’avois que mes mains pour me cacher. Aussitôt un des ministres de la religion ôta sa première robe de dessus lui, et me la mit promptement sur le corps.

Quand cela fut fait, le prêtre me regardant avec un visage où la joie étoit peinte, me parla ainsi : Lucius, après tous les maux que vous avez soufferts, après tant de rudes assauts que la fortune vous a livrés, et toutes les tempêtes que vous avez essuyées, vous êtes enfin arrivé au port du repos, et vous avez trouvé grace devant les Dieux (26) ; ni votre illustre naissance, ni votre propre mérite, ni même toutes les sciences que vous possédez, ne vous ont servi de rien, et vous étant laissé aller au penchant d’une ardente jeunesse, vous vous êtes livré aux indignes voluptés de l’amour, et votre malheureuse curiosité vous a coûté bien cher. Cependant, après tant