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il approcha de ma bouche la couronne qu’il tenoit. Je pris en tremblant et avec une palpitation de cœur extraordinaire cette couronne, composée de roses fraîches et vermeilles, et je la dévorai avec avidité.

Je vois aussi-tôt l’effet de la promesse des Dieux. D’abord je perds cette indigne forme d’animal dont j’étois revêtu ; tout ce poil affreux que j’avois sur le corps tombe et ne paroît plus ; ma peau qui étoit épaisse et dure devient tendre et délicate ; mon grand ventre se rapetisse ; la corne de mes pieds s’étend et forme des doigts ; mes mains cessent d’être des pieds, et redeviennent propres à leurs fonctions ; mon cou s’accourcit ; mon visage et ma tête prennent une figure ronde ; mes longues oreilles diminuent et reviennent dans leur premier état ; mes dents énormes deviennent semblables à celles des hommes ; et cette grande queue, que j’étois si fâché d’avoir, disparoît entièrement. Tout le peuple reste dans l’admiration. Les personnes pieuses adorent le pouvoir si manifeste de la grande Déesse, dans la facilité d’une telle métamorphose, et d’un miracle semblable à ceux que les songes produisent pendant le sommeil, et avec une voix haute et unanime, tendant les mains au ciel, ils publient tous cet éclatant bienfait de la Déesse. Pour moi, saisi d’étonnement, et pénétré ou plutôt accablé, pour ainsi dire, de l’excès de ma joie, je restois dans le silence, n’ayant pas la force d’ouvrir la bouche, quoique l’usage de la