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eu, pour ne pas rougir en le prononçant. Le jeune homme se rend aussi-tôt aux ordres de sa belle-mère qui étoit malade, et regardant son obéissance comme un devoir, va la trouver dans sa chambre, avec un air fort affligé de l’état où il la voyoit. Elle, qu’un pénible silence avoit tant fait souffrir, se trouve interdite à sa vue : elle est dans une agitation terrible, et sa pudeur combattant encore un peu, elle rejette tout ce qu’elle avoit résolu de lui dire, et cherche par où elle commencera la conversation.

Le jeune homme qui ne soupçonnoit rien, lui demande, d’une manière honnête, quelle est la cause de sa maladie. Cette femme le voyant seul avec elle, profite de cette malheureuse occasion ; elle s’enhardit, et lui parle ainsi en peu de mots, d’une voix tremblante, versant un torrent de larmes, et se cachant le visage avec le bord de sa robe : C’est vous, dit-elle, qui êtes la cause de mon mal ; c’est vous qui en êtes le remède, et qui seul pouvez me sauver la vie ; car vos yeux ont pénétré par les miens, jusqu’au fond de mon cœur, et y ont allumé un feu qui le dévore. Ayez donc pitié de moi, puisque c’est à cause de vous que je meurs, que le respect que vous avez pour votre père ne vous retienne point ; vous lui conserverez une épouse, qu’il est sur le point de perdre ; c’est la parfaite ressemblance que vous avez avec lui, qui me force à vous aimer,