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eurent amassé quantité de toutes sortes de choses, qu’ils gagnoient à dire la bonne avanture, ils inventèrent une nouvelle manière de faire venir de l’argent. Par une seule réponse qu’ils imaginèrent, qui pouvoit se rapporter à des événemens différens (9), ils trompoient ceux qui venoient les consulter sur toutes sortes de sujets. Voici ce que contenoit l’oracle :

Les bœufs, qu’au même joug on lie,
De la terre entr’ouvrent le sein,
Afin qu’avec usure elle rende le grain,
Que le laboureur lui confie.

Ainsi, si quelques-uns venoient les consulter, pour savoir les ordres du destin sur un mariage qu’ils vouloient faire, ils leur disoient que l’oracle répondoit juste à leur demande ; qu’il falloit qu’ils se missent sous le joug de l’hymenée, et qu’ils produiroient bientôt de beaux enfans. Si un autre venoit les interroger sur l’envie qu’il avoit d’acheter des terres, ils lui faisoient voir que c’étoit avec raison que l’oracle parloit de bœufs, de labourage et de riches moissons. Si quelque autre venoit consulter le sort sur un voyage qu’il devoit entreprendre, ils lui expliquoient que les plus doux de tous les animaux étoient déjà attelés ensemble, et prêts à partir, et que la fécondité de la terre signifioit que son voyage lui rapporteroit un gain considérable. Si quelqu’un avoit un combat à donner ou à poursuivre une troupe de voleurs, et qu’il voulût savoir