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que je vous dise la vérité, votre tonneau est trop vieux, et fendu en je ne sais combien d’endroits. Se tournant ensuite du côté du mari : Et toi, bonhomme, continua-t-il, sans faire semblant de le connoître, que ne m’apportes-tu tout présentement de la lumière, afin que je puisse être sûr, en grattant les ordures qui sont dedans, s’il pourra me servir ; car ne t’imagines-tu pas que je ne me soucie point de perdre mon argent (8) comme si je l’avois gagné par de mauvaises voies. Ce brave et subtil mari, sans tarder et sans avoir le moindre soupçon, allume la lampe, et lui dit : Rangez-vous de là et me laissez faire, jusqu’à ce que je vous l’aie rendu bien net. En même-temps il ôte son habit, prend la lumière, se fourre dans le tonneau, et commence à racler toute la vieille lie qui y étoit attachée. Le galant mit l’occasion à profit, et pendant ce temps, la femme qui se faisoit un plaisir de jouer son mari, baissant la tête dans le tonneau, lui montroit avec le doigt, tantôt un endroit à nettoyer, tantôt un autre, et puis encore un autre, et puis encore un autre, jusqu’à ce qu’enfin tout fut achevé ; et ce misérable manœuvre fut encore obligé, après avoir reçu sept deniers, de porter le tonneau jusques dans la maison du galant de sa femme.

Après que les saints prêtres de la Déesse eurent demeuré quelques jours dans ce bourg, où ils faisoient bonne chère, aux dépens du public, et qu’ils