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abominations, et à forcer ce jeune homme à satisfaire leur brutalité exécrable et dissolue.

Je ne pus supporter la vue de ces crimes affreux, et je voulus m’écrier : O citoyens ! mais il me fut impossible de prononcer autre chose que la première syllabe, O, d’une voix, à la vérité, claire, forte et convenable à un âne, mais fort mal à propos dans ce moment-là ; car plusieurs jeunes gens du bourg prochain, qui cherchoient un âne qu’on leur avait volé la nuit, et qui alloient avec soin dans toutes les hôtelleries voir s’ils ne le trouveroient point, m’ayant entendu braire dans cette maison, et croyant que ce fût leur âne qu’on y avoit caché, y entrèrent avec précipitation à l’heure qu’on y pensoit le moins, dans le dessein de reprendre leur bien, et surprirent ces infâmes au milieu de leurs débordemens.

Ces jeunes gens appellent aussi-tôt tous les voisins, et leur font part de cet horrible spectacle, donnant des louanges, en raillant, à la sainte chasteté de ces prêtres. Eux, consternés et fort affligés d’une si cruelle avanture, dont le bruit se répandoit déjà parmi le peuple, et qui les rendoit odieux et exécrables à tout le monde, ramassent tout ce qu’ils avoient, et sortent secrètement du château, environ à minuit. Après avoir fait un chemin assez considérable, avant le lever du soleil ; et s’étant trouvés au grand jour en des lieux écartés et déserts, ils