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tôt des cris et des lamentations pitoyables, appellant à son secours son mari, qui étoit le chef de notre troupe. Cet homme essuyant le sang qui sortoit de la blessure, que sa femme venoit de recevoir, crioit de toute sa force aux paysans, en attestant les Dieux : Pourquoi, leur disoit-il, attaquez-vous avec tant de fureur de pauvres passans fatigués du voyage, et pourquoi nous accablez-vous ainsi ? avez-vous peur que nous ne vous volions ? quel est le tort que nous vous avons fait, dont vous vous vengez si cruellement ? encore n’habitez-vous pas dans des cavernes, comme des bêtes féroces, ou dans des rochers, comme des sauvages, pour vous faire un plaisir de répandre ainsi le sang humain.

A peine eut-il achevé de parler, que cette grêle de cailloux cessa, et que les chiens rappellés par leurs maîtres s’appaisèrent. Enfin un des paysans qui étoit monté sur le haut d’un ciprès, prit la parole : Pour nous, dit-il, ce que nous en faisons n’est point dans l’envie de vous voler, ni de profiter de vos dépouilles ; mais nous nous sommes mis en devoir de nous garantir d’un pareil accident, que nous craignions de votre part. Au reste, vous pouvez présentement passer votre chemin en paix et en toute sûreté. A ces mots, nous continuâmes notre route, fort maltraités et blessés en différens endroits, les uns par les coups de pierre, les autres par les chiens, sans qu’aucun en eût été exempt.