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sa chère Psiché, et n’aigrît son mal par quelque excès. Ces deux amans ainsi séparés sous un même toît, passèrent une cruelle nuit ; mais si-tôt que l’aurore parut, Vénus fit appeller Psiché, et lui donna cet ordre : Vois-tu, lui dit-elle, ce bois qui s’étend le long des bords de cette rivière, et cette fontaine qui sort du pied de ce rocher ; tu trouveras là des moutons qui ne sont gardés de personne, leur laine est brillante et de couleur d’or, et je veux, à quelque prix que ce soit, que tu m’en apportes tout présentement.

Psiché s’y en alla sans répugnance, moins pour exécuter les ordres de la Déesse, que dans le dessein de finir ses malheurs, en se précipitant dans le fleuve ; mais elle entendit un agréable murmure que formoit un Roseau du rivage, agité par l’haleine d’un doux Zéphir qui lui parla ainsi : Quelques malheurs, dont vous soyez accablée, Psiché, gardez-vous bien de souiller la pureté de mes eaux par votre mort, et encore plus d’approcher de ces redoutables moutons pendant la grande ardeur du soleil, alors ils sont furieux et très-dangereux par leurs cornes et leurs dents envenimés, dont les blessures sont mortelles ; mais vous pouvez vous cacher sous ce grand arbre, que ce fleuve arrose aussi bien que moi, et quand la grande chaleur du jour sera passée, et que ces bêtes moins irritées se reposeront