la plus vive et la plus affreuse, le suit des yeux tant qu’elle peut. Si-tôt qu’elle l’a perdu de vue, elle court se précipiter dans un fleuve qui étoit près de-là ; mais ce fleuve favorable, par respect pour le Dieu qui porte ses feux jusqu’au fond des flots, et redoutant son pouvoir, conduisit Psiché sur le rivage sans lui faire aucun mal, et la pose sur un gazon couvert de fleurs.
Par hasard le dieu Pan (9) étoit assis sur une petite éminence au bord du fleuve, et toujours amoureux de la nymphe Sirinx transformée en roseau : il lui apprenoit à rendre toutes sortes de sons agréables, pendant que ses chèvres bondissoient autour de lui, paissant de côté et d’autre sur le rivage. Ce Dieu champêtre qui n’ignoroit pas l’aventure de Psiché, la voyant prête à mourir de douleur et de désespoir, la prie de s’approcher de lui, et tâche de modérer son affliction, en lui parlant ainsi : Mon aimable enfant, quoique vous me voyiez occupé à garder des chèvres, je ne laisse pas d’avoir appris bien des choses par une longue expérience ; mais si je conjecture bien, ce que des gens prudens appèlent deviner, à voir votre démarche chancelante (10), l’abattement où vous êtes, vos pleurs et la manière dont vous soupirez, un violent amour vous tourmente ; c’est pourquoi, croyez mes conseils, ne cherchez plus la mort en aucune façon, séchez vos