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leur bonheur n’est connu de personne. Il faut faire sentir à Psiché que nous sommes ses sœurs aînées, et non pas ses esclaves. Retournons chez nos maris dans des maisons bien modestes auprès de celle que nous venons de quitter, et quand nous aurons pris nos mesures sur ce que nous avons à faire, nous reviendrons à coup sûr punir son orgueil.

S’étant fortifiées l’une et l’autre dans cette pernicieuse résolution, elles cachèrent les riches présens que leur sœur leur avoit faits, et arrivèrent dans la maison paternelle, contrefaisant les affligées, s’arrachant les cheveux, et s’égratignant le visage, qu’elles auroient bien mérité d’avoir déchiré tout-à-fait. Elles renouvellèrent par ces larmes feintes la douleur où leur père et leur mère s’étoient abandonnés ; ensuite elles s’en allèrent chez elles toujours occupées de leurs mauvais desseins, et méditant les moyens d’exécuter leurs perfidies, ou plutôt leur parricide contre une sœur innocente.

Cependant cet époux, que Psiché ne connoissoit point, l’avertissoit toutes les nuits de prendre garde à elle. Vous ne voyez pas, lui disoit-il, le péril dont la fortune vous menace, il est encore éloigné ; mais si vous ne vous précautionnez de bonne heure, certainement vous succomberez. Vos perfides sœurs mettent tout en usage pour vous perdre, et sur-tout elles veulent vous persuader de chercher à me voir ; mais, comme je vous l’ai dit souvent, si vous me