Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/374

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

visage. Et, comme la vieille la prioit avec instance de lui dire quel nouveau sujet elle pouvoit avoir pour s’affliger à un tel excès : Ah ! s’écria la jeune fille, en poussant de tristes soupirs ; ah ! je suis perdue maintenant ! je suis perdue sans ressource, il ne me reste plus aucune espérance ; je ne dois plus songer qu’à chercher une corde, un poignard, ou quelque précipice pour finir tout d’un coup mes malheurs.

Alors la vieille se mettant en colère, lui dit, d’un visage plein d’aigreur et de dureté, qu’elle vouloit absolument savoir ce qu’elle avoit à pleurer de la sorte, et pourquoi immédiatement après avoir pris un peu de repos, elle recommençoit ses lamentations avec tant de violence. Quoi ! lui disoit-elle, avez-vous l’envie de frauder mes jeunes maîtres du profit qu’ils espèrent tirer de votre rançon ? Si vous prétendez passer outre, comptez que, malgré vos larmes (ce qui touche ordinairement fort peu les voleurs) je vous ferai brûler toute vive. La jeune fille épouvantée de cette menace lui prit la main et la lui baisant : Pardonnez-moi, lui dit-elle, ma bonne mère, je vous en conjure, conservez quelques sentimens d’humanité, ayez un peu de pitié de l’état déplorable où je me trouve. Je ne puis croire qu’ayant atteint cette vénérable vieillesse, vous vous soyez dépouillée de toute compassion ; au reste, écoutez le récit de mes malheurs.

Un jeune homme, beau, bien fait, et de la