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son affliction, ensuite ils s’en allèrent chercher suivant leur coutume, à exercer leur métier. Tout ce que la vieille put dire à cette jeune fille, n’arrêta point le cours de ses larmes ; au contraire, paroissant encore plus agitée qu’elle n’avoit été, par les sanglots continuels qui sortoient du fond de sa poitrine, elle redoubla ses gémissemens avec tant de force, et d’une manière si touchante, qu’elle me fit pleurer aussi. Hélas ! disoit-elle, malheureuse que je suis, puis-je cesser de répandre des pleurs, et comment pourrai-je vivre, arrachée d’une maison comme la mienne, loin de toute ma famille, d’un père et d’une mère si respectables, et de mes chers domestiques ! Esclave et devenue la proie d’un malheureux brigandage, enfermée dans une caverne, privée de toutes les délices qui conviennent à une personne de ma naissance, dans lesquelles j’ai été élevée, et prête à tout moment d’être égorgée au milieu d’une troupe affreuse de voleurs, de scélérats et d’assassins.

Après avoir ainsi déploré sa triste destinée, la gorge enflée à force de sanglots, le corps abattu de lassitude, et l’esprit accablé de douleur, elle se laissa aller au sommeil, et ses yeux languissans se fermèrent. Peu de temps après qu’elle fut endormie, se réveillant tout d’un coup comme une forcenée, elle recommença à pleurer et à gémir, beaucoup plus violemment encore qu’elle n’avoit fait, se donnant des coups dans la poitrine, et meurtrissant son beau