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spectacles dignes de l’éclat de sa fortune. Mais qui pourroit avoir assez d’esprit et d’éloquence pour bien décrire les différens préparatifs qu’il ordonnoit pour cet effet ? Il avoit des troupes de gladiateurs fameux, des chasseurs d’une agilité éprouvée ; des criminels condamnés à la mort, qu’il engraissoit pour servir dans les spectacles de pâture aux bêtes féroces (25). Il avoit fait construire une grande machine de bois, avec des tours, comme une espèce de maison roulante, ornée de diverses peintures, pour mettre tout ce qui devoit servir aux chasses d’animaux, quand on voudroit les faire représenter. Qui pourroit raconter le nombre et les différentes sortes de bêtes qui se trouvoient chez lui ? car il avoit eu soin de faire venir de tous côtés ces tombeaux vivans de criminels condamnés.

Mais, de tout l’appareil de cette fête magnifique, ce qui lui coûtoit le plus, c’étoit une quantité d’ours d’une grandeur énorme, dont il avoit fait provision ; car, sans compter ceux qu’il avoit pu faire prendre par ses chasseurs, et ceux qu’il avoit achetés bien cher, ses amis lui en avoient encore donné un grand nombre, et il les faisoit tous garder et nourrir avec beaucoup de soin et de dépense. Mais ces superbes préparatifs qu’il faisoit pour des jeux publics, ne furent point à couvert des disgraces de la fortune (26). Car ces ours ennuyés de n’être point en liberté, amaigris par les grandes chaleurs de l’été,