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Elle commence, suivant sa coutume, à étaler tout ce qui servoit à sa magie (21), comme plusieurs sortes d’herbes aromatiques, des lames d’airain gravées de caractères inconnus, des morceaux de fer qui étoient restés du débris des vaisseaux, où des malheureux avoient fait naufrage, des os (22) et des restes de cadavres tirés des tombeaux. On voyoit, d’un côté, des nez et des doigts ; d’un autre côté, des clous où il restoit encore de la chair des criminels qu’on avoit attachés au gibet ; en un autre endroit, des vases pleins du sang (23) de gens qui avoient été égorgés, et des cranes d’hommes à moitié dévorés par des bêtes sauvages, et arrachés d’entre leurs dents. Puis ayant proféré des paroles magiques sur des entrailles d’animaux encore toutes palpitantes, elle fait un sacrifice, répandant diverses liqueurs, comme du lait de vache, de l’eau de fontaine, du miel de montagne et de l’hidromel (24) ; ensuite ayant noué et passé ces prétendus cheveux ensemble, en différentes manières, elle les brûle avec plusieurs parfums sur des charbons ardens. Aussi-tôt, par la force invincible de son art, et par la puissance des esprits qu’elle avoit conjurés, ces corps, dont le poil fumoit sur le feu, empruntent les sens et la respiration humaine ; ils ont du sentiment ; ils marchent et viennent où les attiroit l’odeur de leurs dépouilles qui brûloient, et tâchant d’entrer chez nous, au lieu de ce jeune Béotien que Pamphile attendoit, ils