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les dents du sanglier, ils me jettent hors de la maison en m’accablant d’injures.

M’étant arrêté à la plus prochaine place pour reprendre mes esprits, je me ressouvins, mais trop tard, des paroles sinistres que j’avois dites fort imprudemment à la maîtresse de la maison, et je convins en moi-même que j’avois mérité un traitement encore plus rude.

Toutes les cérémonies du deuil étant achevées (53), comme on portoit le corps du défunt au bûcher, suivant la coutume du pays, et que la pompe funèbre, telle qu’il convenoit à un des plus considérables de la ville, passoit au travers de la grande place, on vit venir un vieillard fondant en larmes, et s’arrachant les cheveux. Il s’approche du cercueil, et l’embrassant, il s’écrie d’une voix haute et entrecoupée de sanglots : « Je vous conjure, Messieurs, par les pieux devoirs que nous nous devons les uns aux autres, regardez en pitié ce pauvre citoyen qu’on a malheureusement fait mourir, et vengez sévèrement ce forfait, sur cette maudite et méchante femme ; car c’est par elle seule que ce jeune homme, qui est le fils de ma sœur, a été empoisonné pour avoir son bien, et en favoriser son adultère ».

Les lamentations de ce vieillard touchèrent tout le monde de compassion ; le peuple, persuadé de ce crime qui lui paroissoit vraisemblable, commença à