Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/198

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’or ; mais holà ! jeune homme, ayez au moins grand soin de garder, comme il faut, le corps du fils d’un des premiers de la ville, et de le garantir soigneusement des maudites harpies. Ce sont, lui dis-je, des misères et des bagatelles que cela ; vous voyez un homme infatigable, qui ne dort jamais, qui voit plus clair que Lincée ou Argus même, et qui est tout yeux.

A peine avais-je fini de parler, qu’il me mena en une maison, dont la grande porte étant fermée, il me fit entrer par une petite porte de derrière, et monter dans une chambre close et sombre, où il me montra une dame toute en pleurs, habillée de noir ; et s’approchant d’elle : Voici, dit-il, un homme qui est venu s’engager hardiment à garder le corps de votre mari. Elle rangea de côté et d’autre ses cheveux qui lui tomboient sur le visage, que je ne trouvai point abattu, malgré son affliction ; et me regardant : Prenez garde, dit-elle, je vous prie, à vous acquitter comme il faut de ce que vous entreprenez. Madame, lui dis-je, ne vous mettez point en peine, pourvu que vous ajoûtiez quelque petite honnêteté à ce qu’on me doit donner. Elle me le promit ; et se levant dans le moment, elle me mena dans une autre chambre. Là étoit le corps de son mari, enveloppé de linges blancs, et y ayant fait entrer sept personnes, elle-même leva le linge qui le couvroit ; et, après avoir long-temps pleuré, elle