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montrai un vieillard qui étoit assis dans un coin. Aussi-tôt il se met à le réprimander avec beaucoup d’aigreur, suivant l’autorité que lui donnoit sa charge d’Ædile. Ha ha, dit-il, vous n’avez garde d’épargner les étrangers, puisque vous écorchez ainsi nos amis ! Pourquoi vendez-vous si cher de méchans petits poissons ? Vous rendrez cette ville, qui est la plus florissante de la Thessalie, déserte et inhabitable par la cherté de vos denrées ; mais vous en serez puni : car tout présentement je vais vous apprendre, comme pendant le temps de mon exercice, ceux qui font mal sont châtiés. Et renversant mon panier au milieu de la place, il commanda à un de ses huissiers de marcher sur mes poissons, et de les écraser. Mon brave Pithias, content d’avoir ainsi montré sa sévérité, me conseilla de me retirer : Il me suffit, mon cher Lucius, continua-t-il, d’avoir fait cet affront à ce petit vieillard. Surpris et consterné d’avoir perdu mon souper et mon argent, par le bel exploit de mon sage et prudent camarade, je m’en vais aux bains ; je m’en retournai ensuite au logis de Milon, et me retirai dans ma chambre.

Je n’y fus pas plutôt, que la servante Fotis vint me dire que son maître me demandoit ; mais ayant déjà bien reconnu l’avarice de cet homme, je lui répondis que je le priois de m’excuser, ayant plus besoin de me reposer que de manger, fatigué comme j’étois de mon voyage : ce qui lui ayant été rapporté,