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l’amour de l’humanité. Je comprends qu’on puisse aimer sa femme, ses enfants, son père, sa mère, ses frères et sœurs, ses amis ; je comprends que l’on puisse aimer le pays où l’on est né, et, quand la patrie est en danger, qu’on sacrifie sa vie pour elle ; je comprends qu’on puisse non seulement apprécier par l’esprit, mais, jusqu’à un certain point, aimer de cœur, des hommes inconnus, des étrangers, s’ils ont élargi notre horizon spirituel, s’ils nous ont donné un plaisir sublime, s’ils ont étonné notre imagination par quelque acte héroïque. Mais aimer les hommes seulement parce qu’ils sont des hommes ! Je doute que quelqu’un ait réellement éprouvé ce sentiment. Pourquoi les Chinois seraient-ils plus près de mon cœur que les minéraux enfouis dans les forêts vierges de l’Amérique ? Qu’on professe un amour négatif consistant à ne pas faire de mal ou même à ne pas souhaiter de mal aux Chinois, je le comprends encore, — et je ne souhaite aucun mal aux minéraux. Qu’ils gisent en paix dans le sein de la terre américaine et que les Chinois jouissent de la vie dans le Céleste Empire. Passer leurs frontières, je ne le désire aucunement, car s’ils voulaient visiter l’Europe en foule, il serait bien difficile de lutter contre eux. Je