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dit, par exemple, que Maria Pétrovna, malgré ses distractions, n’est pas une sotte ; mais, quand je l’ai écrit j’étais de très bonne humeur. Mal disposé, je pouvais dire absolument le contraire, et je n’aurais pas été loin de la vérité. Hier, elle m’a envoyé des pilules homéopathiques avec la recommandation la plus sévère de n’en pas parler au docteur. Aujourd’hui, Féodor Féodorovitch est entré chez moi en me demandant :

— Eh bien, et la pulsatille vous a-t-elle réussi ?

— Qui vous a dit… ?

— Maria Pétrovna naturellement.

Pour moi, ce n’est qu’en logique que l’esprit donne sa mesure. Or, de ce point de vue je ne puis pas dire que je sois un sage. Souvent je n’ai pas fait ce que j’avais résolu, et néanmoins je puis jurer n’avoir jamais menti avec préméditation. Dans mon enfance, ma vieille tante Avdotia Markovna me grondait un jour pour une espièglerie : « Toi tu es sage, me dit-elle, mais ta tête ne l’est pas. » Je crois qu’elle avait raison.

J’appartiens à une vieille famille noble, conservatrice, et l’éducation autant que la vie militaires n’ont fait qu’aggraver mon conservatisme. Le principal, l’unique roman de ma