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LES ONZE MILLE VERGES


gne, ma mère, j’achève les soldats russes. Je voudrais tuer Kouropatkine et je souhaite la mort des Romanoff.

Mon frère qui est aussi mon amant et qui m’a dépucelée pendant un pogrome à Varsovie, de peur que ma virginité ne devint la proie d’un Cosaque, éprouve les mêmes sentiments que moi. Il a égaré le régiment qu’il commandait et a été le noyer dans le lac Baïkal. Il m’avait annoncé son intention avant son départ.

C’est ainsi que nous, Polonais, nous nous vengeons de la tyrannie moscovite.

Ces fureurs patriotiques ont agi sur mes sens et mes passions les plus nobles ont cédé à celle de la cruauté. Je suis cruelle, vois-tu, comme Tamerlan, Attila et Ivan, le terrible. J’étais pieuse autrefois comme une sainte. Aujourd’hui Messaline et Catherine ne seraient que de douces brebis au prix de moi.

Ce ne fut pas sans un frisson que Mony entendit les déclarations de cette exquise putain. Il voulut à tout prix lui lécher le cul en l’honneur de la Pologne et lui apprit