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LES ONZE MILLE VERGES


et que vous remettiez cette dépêche au généralissime.

On prépara un ballon. Pendant huit jours Mony et Cornabœux s’exercèrent au maniement de l’aérostat qui fut gonflé un beau matin.

Les deux messagers montèrent dans la nacelle, prononcèrent le traditionnel : « lâchez tout ! » et bientôt ayant atteint la région des nuages, la terre ne leur apparut plus que comme une chose petite et le théâtre de la guerre leur apparaissait nettement avec les armées, les escadres sur la mer et une allumette qu’ils frottaient pour allumer leur cigarette laissait une traînée plus lumineuse que les boulets des canons géants dont se servaient les belligérants.

Une bonne brise poussa le ballon dans la direction des armées russes et après quelques jours ils atterrirent et furent reçus par un grand officier qui leur souhaita la bienvenue. C’était Fédor, l’homme aux trois couilles, l’ancien amant d’Hélène Verdier, la sœur de Culculine d’Ancône.

— Lieutenant, lui dit le prince Vibescu en