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et semblait réellement malade. Elle se réjouit pourtant de ma visite.

Ma polissonnerie naturelle ne tarda pas à se réveiller. Mais lorsque je voulus la toucher sous les couvertures, elle se tourna en disant : « Non, Roger, depuis avant-hier, j’ai mes affaires… tu sais bien…, et j’ai trop honte. — Ah ! dis-je, tes menstrues, ainsi tu n’es plus une fillette, mais une femme. Je suis aussi devenu un homme, Berthe », ajoutai-je fièrement et, me déboutonnant, je lui montrai mes poils et mon vit décalotté. « Et je l’ai fait aussi, tu sais ! mais je n’ai pas le droit de dire avec qui.

— Tu l’as fait ? demanda Berthe, mais quoi donc ? »

Alors j’expliquai le coït à ma sœur attentive.

« Et tu sais, papa et maman le font aussi toujours.

— Va donc, c’est trop dégoûtant. » Elle dit cela d’un ton qui signifiait le contraire, et j’ajoutai : « Dégoûtant ? Pourquoi donc ? Pourquoi donc deux sexes ont-ils été créés, Berthe ? Tu ne peux pas croire comme ça fait du bien, beaucoup plus de bien que quand on le fait tout seul.

— Oui, ça m’a semblé toujours meilleur lorsque Kate me branlait que lorsque je le faisais seule. Et avant-hier, ah ! je croyais être au ciel. Alors Kate m’a dit : “Maintenant ça t’est aussi venu, Berthe, fais attention, tu vas bientôt avoir tes affaires.” Ce même jour j’ai eu mal au