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joues fussent, lorsque j’entrai, couvertes d’un rouge intense.

Je fis semblant de ne pas m’apercevoir de sa confusion et lui dis doucement : « Tu dois aussi t’ennuyer quelquefois ma petite tante. Le prêtre qui naguère logeait ici, avait des livres très intéressants au sujet de la vie humaine. Tu peux en emporter quelques-uns dans ta chambre. » Je pris deux livres : Le Mariage dévoilé, Amour et mariage et les lui mis dans la poche. Comme elle faisait des manières, j’ajoutai : « Naturellement, cela reste entre nous, nous ne sommes plus des enfants. N’est-ce pas petite tante ? » Et je lui sautai brusquement au cou en lui donnant un baiser sonore.

Elle avait un joli chignon et une nuque délicieuse. Les beaux chignons et les jolies nuques m’ont toujours mis hors de moi, aussi je posai sur sa nuque de gros baisers qui me grisèrent complètement.

Mais chez Marguerite, la confession faisait encore son effet. Elle me repoussa, mais sans violence, et s’en alla, emportant les livres dans sa poche, après avoir jeté encore un coup d’œil sur ma chambre.

L’après-midi, j’avais entendu le religieux s’en aller avec les dames. Je décidai de chercher Berthe pour lui demander la raison qui l’avait fait simuler une indisposition, afin de sauter la confession.

Mais il n’en était pas ainsi. Elle était couchée